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L'élégante

Publié le par François & Marie

Ses ongles sont de rubis laqués,
Ses doigts de saphir bagués,
Son cou de deux rangs de perles orné.
Dans sa main fine, un sac immaculé,
En carrousel sur sa gracile épaule, une ombrelle légère.
Sur ses bottines lacées haut, elle déambule, altière...
Se tordant les chevilles...la petite fille.

bottines

Dans les années cinquante, ses sept ans elle étrenne.
De l' Elégance elle se prend pour la Reine... 
Dans la poussière du pré de la basse-cour, il n' y a pas foule,
Pour admirer sa dégaine... seulement quelques poules..
Son imagination va bon train. Elle ose esquisser des ébauches...
Scalpe un géranium, dix pétales pour ses bouts de doigts vermillonner.
Empomponne ses annulaires du lilas des succises des prés. 
Arbore des perles blanches et un sac plastifiés, tout droit sortis des presses à injecter. 
Tournicote sur son épaule la paille de riz du parapluie gagné à la kermesse.
Chaparde les bottines maternelles, les noires, celles réservées à la messe,
Y cale le bout de ses orteils avec un vieux journal,
Cinq pointures de trop, ouh ! c'est pas génial...bottines2
Superbement harnachée, elle descend l'échelle du poulailler et se baptise Meneuse de défilé.
Toisant les affairées gallinacées, sussurant- Mesdames, laissez passer...
Prévenant les canards de Barbarie- Votre soutane gominée vous sert trop le kiki, vous allez suffoquer, votre face écarlate le laisse redouter. 
Se pâmant devant le coq-  Diantre Lieutenant, ce képi rouge garance vous a des allures de Vieille France...
Courrouçant les dindons, qu'elle traite de laiderons.
Roucoulant avec les pigeons- Rououou, votre gris tourterelle ferait un chic plastron !
Interrogeant une pintade -Ma chère où trouver de votre robe de tulle, les pois?... Mais ne criaillez point, je ne vous les chiperai pas !
Rêvant devant la blanche poule de Bresse  -Demoiselle, vous porterez la robe de mariée du prochain défilé...
Hélant la meneuse de couvée - S'ils cessent de piailler, veuillez me réserver vos six petits pulls mohair jaune poussin pour cet hiver qui vient !
Se pavanant, virevoletant, elle va ainsi, 
Semant dans toute la basse- cour sa zizanie.
Se prenant un instant pour la Reine d' un jour...
S'affalant, harassée, à l'ombre du cerisier, contre le flanc du grand chien de berger. 
Constatant- Ben mon vieux Mousse, tu sais,
Etre une Elégante, ça fait très mal aux pieds...
A la marelle, je préfère jouer.
Mais avant, tu veux bien partager mon goûter?

Publié dans La p'tiote

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Sept heures 'au clock'

Publié le par François & Marie

Sept heures "au clock " 

Donc, cinq heures au soleil.

D' un pas semi-élastique, je crapahute dans le chemin pierreux de la côte des vignes. Hou, là, ça grimpe !

Oui, c'est le destin d'une côte...Marche...

J'ai salué un amas de gros champignons blancs étalés à l'ombre du vieux frêne. Ah ? des Charolaises... Exit les Montbéliardes... ? Tu cogiteras plus tard sur le pourquoi de la mutation ; après tout les Charolaises sont des Montbéliardes qui veulent jouer aux rosés des prés. Marche...

portailjpg.jpgPas une once de rosée, signe de changement de temps. Le maïs aurait besoin d'eau, il commence à corder (1). Et moi, il faudrait m'encorder...Cette côte est redoutable.

Oui, mais c'est en mettant un pied devant l'autre qu'on avance. Marche... Au bout de la vigne là-haut, ça brille... Moi qui croyais être seule à battre la campagne à l'aube au clock, j'ai de la concurrence. Marche...

Une carapace et quatre roues. Oui, on appelle ça une auto. Marche... Des numéros à éternuer, sûrement des Hollandais. Regarde mieux, en bas à droite, ah oui, il faut des lunettes ! Ce tout petit 39, c'est un indigène du cru !

Le téméraire ! Il a osé risquer ses chromes et son chic gris métallisé dans ce "chemin montant, sablonneux, malaisé et de tous les côtés au soleil exposé" (merci Monsieur de La Fontaine !). J' aperçois le phaéton des six chevaux à injection directe (mazette, quelle Technologie !)

Expéditif, il arpente, sans vraiment leur prêter attention, les rangées de cette vigne qui fût celle de mon grand père. Agité, il téléphone d'une oreille en gesticulant des explications inutiles à son invisible interlocuteur.

Déguisé sobrement d'un tee-shirt rouge, enshorté de bleu-canard, casquetté de jaune citron (désastreuse retombée du passage récent du Tour vélocipédique ... ), embasketté de coussins d'air ; s'il n'effraie pas le mildiou, il peut jouer à merveille le répulsif à volatiles gourmands de grappes prometteuses.

Peu concerné, il ne frôle aucune feuille, ne goûte à aucun grain, n'a pas un regard pour les vieux ceps. Pressé, il court à sa limousine et file vers d'autres urgences qui peuvent sans doute attendre, dérangeant la poussière dans un asphyxiant sillage...

March...STOOOOP la petite voix ! Je fais une pause. Tu vois cette vieille croix de pierre, rongée par les ans, informe et vert-de-grisée de lichen, j'ai joué à la marchande à ses pieds. J'étais petite, j'accompagnais mon grand-père qui venait visiter son lopin de Seibel. Dans mes souvenirs... Paisiblement, la vieille mule dételée d'un char sans immatriculation, broute à l'ombre des grands chênes. Tranquillement, son maître, dos courbé, chapeauté de paille, ensaboté, prend des nouvelles de la future récolte en parlant aux vieux ceps. Il a roulé les manches de sa chemise jusques aux coudes. Il relève un sarment, arrache des chardons, soulève une grappe, en observe les grains. Hoche la tête. Il vérifie, en passant, la dureté des pêches de vigne riquiqui dont il ne profite jamais, elles plaisent aux maraudeurs... Il extirpe une ficelle de sa large ceinture de flanelle et emprisonne les buissons d'osiers exubérants qui limitent les rangées de vigne et lui servent de liens.

Le socle chaud de la croix est recouvert de cailloux et de fleurs des prés, censés représenter une table dressée, lorsqu'il me rejoint. Il me fait un clin d'oeil, et sort de la musette en grosse toile marron les tartines du goûter. Suprême honneur, je partage avec lui dans une timbale en aluminium rapportée des tranchées, le vin largement coupé d'eau qui glougloute du litre à étoiles emmailloté d'un journal humide. Aujourd'hui... Disparus le monologueur attentif et sa capricieuse Mulette (2)... Abattus les vieux chênes. Volatilisés les pêches rouge sang, les osiers taillés à l' Eustache et le char à ridelles... Reste la croix. Je vais comme autrefois déposer à ses pieds un bouquet de colchiques. Euh.?..Marche ?

Oui, march...Facile à dire, un, puis deux, puis trois quads pétaradants occupent d'autorité l'espace déambulable, avec la ferme intention d' éliminer tout élément gênant leur bruyante progression. Dans un sursaut d' Humanité, ils m'épargnent. Sans doute m'ont- ils prise pour une espèce protégée, celle de marcheuse dans les petits chemins qui montent, cailloutent et... font germer les souvenirs...

1* Corder : quand le maïs manque d'eau, ses longues feuilles s'enroulent sur elles-mêmes, telles des cordes tendues vers le ciel, implorant la pluie. 2* Voir "La Mulette."

Publié dans choses vues

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L'viou noah

Publié le par François & Marie

( La vieille treille patoisée-)

Noah Old Pic" Que coup' bâs, s'en r' pend pâs. "  E caus' bin c' diton...
J' vins d' tailli la ville veugne, j'é bin pô d'avouèr' trop jue du sècâteûr. Ill pieure, c' tu coup. J'ém' pas bin la vouèr' qu' m'en çan...
J' voudrôs point qu' te passes l'arme à gauche, min viou noah.
Y fè bin pi-e d' cent ènnias qu' te bailles dè balles feûilles ape du raîsin...que nion côt apré ! Mém' lè z' uziaux en viant point ! Mè an t' ém' bin trop, an voudrot point t' pèdre...
T'âs du r' jingo, tins l' coup viou noah !


Voir le texte en français ici

Publié dans Histoire en Patois

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L'battouèr'-

Publié le par François & Marie

Bin, y'en ètot t'y du chanfrin, c' je du battouèr'.
Y' avôt d' jà, la vouaille, l' Roger qu' èrrivôt d'aveu tout s' n' attirèille.
Y' ètôt auquouè, j' vôs y dit !

battage1
Y' en faillôt du timps pou bin câler la grousse loc'môtiv ape la bâtteuse.
L' je, y qu' menssôt au lusot, quan an r' veniôt d' la futrie. E z'ètint tou ique, lè aidiants, èn' quinzén'.
An boivôt in jus, an f' môt la darrér' Troupe, ape an n' y allôt.
Y derôt la jeunia, din l' bru ape la pousserôt'.
An avôt du mô, mais an ètôt corègeou. Y' èto du travouèlle de fôche, lè jârbes ètint bin lourdes, lè sa ètint lourds atou, mé an s' édjot, y' en avôt point qu' tirint è r' nards.
Y' avôt touj' in bon casse-creut', lè fones ètint boun' cus' niéres ape point faignantes.
An avôt la rigolette en l'ér' c' je là ! Y'en avôt touj' pou fér' dè fèrdaines qu' m'en lè rates din lè pouchs ! 
Lè ptchiniots ètint point en rèst', è dèbaroulint din lè balots ape è s' corratint din la pè -yelle, è z' ètint frais l'sè ! Mé, yeutè y-u brillint ape è z'avint lè rognons badjots! C' t' affér là, an l' ubi-e point ape , an s'en rappalle touj' de c'te je du battouèr'.

Publié dans Histoire en Patois

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Les battages

Publié le par François & Marie

On est encore petits, alors on nous a cantonnés, par précaution derrière le grillage à mouches de la porte de la cuisine .
C'est la veille d' un grand jour, celui du battage. Depuis mi-juillet, les gerbes patientent sous un hangar, entassées jusqu'au faîte du toit .
Les yeux aussi ronds que la bouche, on assiste de loin à l'entrée lente, asthmatique de deux mastodontes. La locomotive, énorme grillon noir à long groin, tracte le paresseux wagon rouge de la batteuse qui trimera dur demain. Ce soir, mollement, docilement, elle fait la planche...
La nuit tombe alors que se terminent mise en place, calage des engins et montage des courroies.
00207 000On nous permet maintenant d' aller voir de près les colosses. On en fait le tour, on se noircit avec ravissement les mains aux  flancs poussièreux qui sentent la graisse chaude. Puis on va dormir, demandant à être réveillés à l'aube, on ne veut rien manquer du grand jour.
Le lendemain, dès les vaches traites, une quinzaine de voisins et parentèles, masculins de tous âges, en bérets, ceintures de flanelle ou marcels, investissent l'espace. 
Sous l'avant-toit devant la cuisine, une armada féminine s'affaire derrière deux longs plateaux de sapin sur tréteaux. Les ouvriers du jour se pressent devant. Ils boivent, debouts, du café bien serré servi dans des verres en Pyrex. Certains irréductibles réclament que leur noir breuvage soit baptisé d' une généreuse rasade de " goutte ". La gnole du René, maître des lieux, est de bon renom ! Le volume des pyramides de bugnes diminue à vue d'oeil, belle récompense pour la Fernande qui a pâtissé hier jusqu'à l'heure de la traite. 
Les accros du gros gris en  profitent  pour savourer leur dernier mégot de Gauloise. La paille et le feu ne font pas bon ménage.
Burette.jpgPour le Roger, grand maître d'oeuvre, la responsabilité est grande. Tout au long de cette journée, il devra  veiller au bon fonctionnement de ses engins, sa réputation est en jeu! Chiffon gras et burette en mains, béret- tarte et pantalon à bretelles, il s'affaire autour de la locomotive qui toussote, tchou-tchoute puis prend son rythme de croisière entraînant la grosse batteuse dans un ronronnement de bielles bien huilées.

Depuis des années, ils s'entraident entre voisins. Les équipes sont bien rodées, chacun connaît sa tâche. Seul le vieillissement et sa kyrielle de diminutions physiques peuvent chambouler quelque peu la donne. On change de poste en douceur pour éviter les blessures d'amour propre...
l battages biaisL' Emile, le Francis et le Darius, les musclés, lancent les gerbes sur le tapis roulant.
Statiques en haut de la batteuse, deux anciens, l' Ernest et l' Omer. Ils réceptionnent les gerbes, en tranchent les ficelles d'un Eustache agile, les éparpillent et les dirigent vers l'égrenoir. Leur collier de ficelles autour du cou les transforment en insolites vahinés.
Surveillant l'écoulement des grains dans de grands sacs en jute, deux équipes de robustes, le René, le Gugu, le Charles et  le Louis. Leurs épaules et leurs nuques, vont se coltiner des dizaines de fois des charges de cinquante kilos. Par l'échelle, il leur faudra grimper au grenier,
s'y délester de leur précieux fardeau "., redescendre pour remonter ensuite, exténuant...
Le Maxence et le Francis empilent sur un char la paille bottelée tendue à la fourche par l' André et le Léon. Quand l'échafaudage dépasse largement les ridelles, la jument comtoise conduit paisiblement l'équipage jusqu'au pré à côté du potager. Là, l' Aristide et le Médé, architectes es chaume, vont avoir une importante responsabilité, dresser l'énorme meule de paille.  Leur édifice devra défier les forces d' Eole, la loi de la pesanteur et les sournoises infiltrations des pluies...Leurs meules sont célèbres dans le secteur, on les reconnaît de loin, on les a baptisées les Médari ! Ceux du village qui ne font pas partie de leur équipe, envient la perfection de leur faîte, qu'ils ne peuvent égaler.  
Deux pauses dans la matinée permettent de souffler un peu, de se rafraîchir et se désaltérer. 
400px-10.jpgLe Roger en profite pour buretter à tout va et pour ausculter ses chouchoutes ! Il est soulagé, les courroies n'ont pas sauté et il n' a eu droit qu'une seule fois au couplet " Oh! Le Roger, tes fi-fi, tes fi -fi, tes ficelles, oh! le Roger, tes ficelles elles ont cassé. Oh ! le Roger, ta cho-cho, ta cho- cho, ta  chopine, oh ! le Roger, ta chopine faudra payer !" joyeusement entonné par toute la troupe ! Il est accouru, ses grands  bras en moulinets, a stoppé la batteuse et réparé avec dextérité. La chorale improvisée le  remercie  d' un  "Ah, le Roger, y' è bin touais, y'est bin touais, l' pieu adret ! Mais le Roger, la cho-cho, la cho-cho, la chopine, mais le Roger, la chopine faudrô t' y point l' u-bier !". Le Roger, habitué à être charrié, a rétorqué " Ouais, causi touj *!" en pinçant son béret-tarte et a couru relever la manette. Et le gros wagon rouge s'est remis à bourdonner.
Les cloches de l' Angélus de midi donnent le signal du casse-croûte !
Dans une ambiance de cour de récréation, sous l'eau fraîche tirée de la pompe, la troupe s'ébroue. 
L' installation  autour de la grande tablée est désordonnée, bon enfant.
Les femmes arrivent tenant serrées des soupières fumantes.  En louches généreuses, elles servent les assiétées. La purée, beurrée- crémée maison, les poulets et les chipolatas, sont accueillis avec grand plaisir. Elles veillent à ce que personne ne manque ni de  pain ni de vin. Elles apportent des pots d' eau fraîche, consommée avec parcimonie! Les appétits se calment un peu. Pourtant personne ne rechigne devant le comté, les tartes aux mirabelles, le café et le  pousse café! 
Souris.jpgChacun prend son temps, retrouve sa pipe ou roule son gros gris. Les Eustache, Laguiole, Opinel, Pradel et autres Solingen signalent en claquant, la fin de la pause. Les conversations roulent sur la météo, le lait, la sciatique, le mildiou, les vaches, le bal de la mi' stembre. Il y a des rires et des fredaines, on glisse une souris dans la poche du voisin, on noue les lacets des galoches aux pieds des chaises, on accroche les casquettes bien haut dans le vieux tilleul.  Demain et jusqu'à la fin des battages, ils iront s' entraider de maison en maison pour rendre la pareille. 

Le Roger passera la fin de l'automne et l'hiver à vérifier pièce par pièce ses deux monstres précieux. 
Les grains de blé deviendront farine à pain doré. 
L' orge et l' avoine engraisseront les cochons. La paille fera des litières fraîches aux chevaux,vaches et lapins. 
Et les enfants, on les a oubliés ! Le vrombissement de la batteuse a rameuté les cousins, les voisins. Ils sont six ou huit à faire de joyeuses roulades dans la poussière des balles, ils éternuent, suffoquent mais rien ne les arrête. Ils grimpent au grenier. Font " le mort " dans les grains blonds du blé qui coule comme de la belle eau de leurs doigts écartés.  
Ils sont en train de se constituer un monceau de souvenirs. Ils ne s'en doutent pas, ils ne le sauront que bien plus tard...

* Causez donc !

Publié dans Souvenirs

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La vielle treille

Publié le par François & Marie

Au printemps elle a pleuré de petites traces mouillées sur la pierre de l'entrée,
Et je n'ai pas aimé...
Comme chaque année, j'ai culpabilisé.
Ai-je eu le sécateur trop leste ?
-
Tailler de biais chaque sarment à deux yeux, c'est ce que dit le texte,
Pioché dans
l'almanach du Père François.
Sans aucun doute digne de foi...
Et la parité ? Respectée ! Je lui laisse deux yeux, j'en ai deux, moi aussi.
La montée de la lune ? Ah, il fallait s'en inquiéter, tu dis...
La vieille treille, elle ne va pas trépasser, dis ?
J'en serais bien marrie...

Treille-copie-1
Chaque matin d' un doigt anxieux, espérant un mieux, 
J' effleure ses larmes qui grelottent.
- Mais, ça va s'arrêter? Saperlotte...
Et puis le chagrin cesse et la pierre s'asséche.
Les feuilles se déplient, de minuscules fleurs et puis de grapillons, suivies.
Cet été, de vrilles frisottées en circonvolutions, le feuillage a recouvert toute la maison.
Septembre dévoile les grosses billes vertes des grappes épanouies,
Elles s'offrent aux oiseaux...ils les fuient!

Pauvre vieux noah, tu ne vaux pas un délicat muscat...
Ta peau est trop épaisse et ta pulpe en litchis encombrée de pépins.
Pourtant, ta pugnacité j'honorerai, en  goûtant... deux... de tes grains,
Oui, deux, pas plus...Hum, il  faut savoir en laisser pour les autres... partager.
Et je ne voudrais pas t'épuiser, de plus de deux cents ans tu es âgé.
Ton cep noir et tordu, mes arrières grands- parents, l'ont déjà bien connu.
Tes larges feuilles vers le ciel tournent leurs paumes palmées,
Bientôt elles vont roussir et, aux premières gelées, tomber.
Puis l' hiver manchonnera tes longs rameaux givrés.

Enfin mars réveillera le sécateur. Il viendra en bienfaiteur,
Couper les ramures inutiles, qui menacent les tuiles.
Il te fera une toilette de printemps. Tu vois il n'est pas bien méchant !
Il y aura quelques larmichettes... de joie .
Ton feuillage s'enhardira presque jusque sur le toit.
Tu sais qu' il est précieux sur les tables d'été, 
Il sert de lit douillet au morbier, au chèvre et au comté.
Et tes raisins, dis-tu ? Ben...Assieds-toi, on va en parler...

treille2-copie-1.jpg
..............Voilà, voilà, voilà...
Si tu pouvais les éviter et seulement des feuilles donner, chacun t'en saurait gré...
Tope- là ! J'en rêvai! Plus légère je serai.
Et encore plus haut pourrai grimper, peut-être jusqu'à l'antenne télé, j'adore les feuilletons -télé...
..............Voilà, voilà, voilà... Il suffit de savoir parler vieux noha. Voilà !

Publié dans Souvenirs

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Rituel Minuscule

Publié le par François & Marie

Infinitésimale.
Blond caramel.
Egarée.
Sous le dodu du bol cachée. 
Débusquée. 
Du bout d'un doigt piégée,
Picorée.
Lentement savourée,
Ultime miette de pain grillé,
Exquis vestige de petit-déjeuner...
Grignotée, croustillée, yeux fermés...

miette

C'est un rituel très agréable pour moi que de débusquer, à chaque fin de petit-déjeuner, une miette grillée (indispensable, le croquant du  grillé !). 


La reutchiâ-

T' mets su la piatine d' la cus' niére Gaudin, rug' de chaud, in bon bout d' pain d' ménège.
T' laisses à lèsi pou què sé bin grilli, dè deux coûtés.
Méfie-te bin, dè coups, è d'vint tout nâ .
Te r' vins d' la futrie. T'as rèmouné du beûr' tout fré. 
T' âs bin drêt à in vérre d' jus, d' vant d' èller bailli l' bouèr' è viaux. 
La fône a embocalé dè grusalles qu' sant balles ruges. Te t' fè èn' boun' reutchiâ, pou trampoter dans tin vér' de jus.
Hein don qu' yè bon !
R' gaidje bin su la touail' ciria, cheu sûr que t' vâs trouver èn' ptchiote mié grillie qu' t'avo pouaidju.
Chop' la daveu tan Eustache, goût' me çan en  fremant les u ap'en frisotant ta moustèche.
Hein don qu' yè bon !
Faut pas grin cheûse pou qu' la jeuniâ qu' mence bin...
Mais y'  è pas l' tout, faudrot point t' rendreumi ! Tè bilots ètendant yeut' pitance, bouge-te vouair' un pcho,  v' là la fone que vint vouèr' c' qu' t' branquille ! J' crè bin qu' yè temps d' fremer tan cutchô ...

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La rogneur

Publié le par François & Marie


Qu'è c' qu' y è don c't'è ptchiots teurtillons bian-crém' ? Bin, y'è çan, la rogneur !*

* "Auteu du lait, j' vas vôs dir'-"
Rognure

Ces petits tortillons blancs-crèmes? Mais, c'est ça la fameuse rognure !*

*" Le lait et ses environs"
-

Publié dans Souvenirs

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Acout' vouèr'

Publié le par François & Marie

Acout' vouèr'-

Din la bouèt' que cause è s' piaignant que c' t châtemps duais mil dix, tout c'tè qu' vont in vadroïlle, è z' èrint migi pieu d' sope que d' yaice...
Lè mèrchans d' yaice, dains l' timps, è z'ètint bin pieu maulaise ! Ique, an savot point c'qu' iètot, c' ta yaice! 
An migeot d' la sope tous lè je, qui fiè du soulè, qui pieuv' ou bin qui jale ape gnon en causôt...

soupe.jpg


Ecoute en passant.

Aux infos, ON se plaint. En cet été deux mille dix, les vacanciers ont consommé plus de soupe que de glaces...
Ici, autrefois, les marchands de glaces auraient été encore plus mal lotis, la glace, on ne connaissait pas. 
On mangeait de la soupe tous les jours, qu'il y ait du soleil, qu'il pleuve ou qu'il gèle et...personne n'en parlait .

Publié dans Histoire en Patois

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Décalage

Publié le par François & Marie

T' m' encrairâs point ! Mè ptchiètes lignes s' en sant en allées d'ique, ill  z'ont travêchi lè grânds gouillats d' aigue pou atèri à 6000 kilômétres, è z' Amèriques ! Ape, ill s'en  sont enr' torner ique d' vant touais qu' lè lis. T' y crè te ? J'en seu tout' étabutée, j' en r' vins point, tchain...
T' âs t' y vu qu' men ills sant lè majons lè van ? Y 'è t' y haut, y t' en baille le lodjot tout çan.
Y' en a t' y du monde, praisque autin qu' pou la fouère de Longwy *! E z' ont don ren à fér' qu'è s' proumounant tout l' je ? 
Ape, y roul' din tous lè sens, j' s' rô prou môlaise lévan daveu man vèlô...
T' âs vu pou tarre, y è prou brave c' tè zig-zag mè, è z' ont bin du temps à pèdre, te crè qu'è fiant dè yérôgliphes m' en çan pouaitchou ? E d' vant point réparmer lè pinceaux !
Y è bin brave lè Améric' mé, an dais bin ét' aisi d' r' veni chu souais, t' crè point ?

* Longwy sur le Doubs, dans le Jura. Célébre rendez-vous des Lonvociens et autres Francs -comtois, dernier samedi et dimanche de septembre, depuis... 1383.

On-the-Road.jpgLes vibrations des criquets tirent François du sommeil. Les cloches de l' Angélus sont à Marie réveil. 
Là où  est François, la Liberté est en statuée. Chez Marie, une Marianne en bustée au-dessus de l'évier contemple, blasée, la vaisselle empilée.
Depuis un cent deuxième étage, François prend en photos des buildings-échalas. Marie immortalise le vieux tilleul, et la pierre où repose le chat.
Comme la raie sur un crâne gominé, François suit à leurs traces, les rues bien rectilignes, depuis l'Empire State Building.
Marie crapahute dans les chemins herbus, pentus, à l'ombre des vieux chênes tordus.
De delicatessen cornichonné François va déjeuner.  Marie fait un méli- mélo des restes de frigo.
François ronronne en croquant des peanuts grillées dans un gros cornet gris. Marie sans plaisir ni sel ni beurre, machouille des radis piquants et racornis.
Fournaise, clim, fournaise, clim, un rhume François a attrapé. Marie lui dit fallait emporter un gilet.
Six heures de décalage. 
Soustraire, additionner pour savoir ou l'autre en est de sa journée.  
Six mille kilomètres, c'est loin l' Amérique...
Tais-toi et rame!

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